
Les mercredis de Dieu

Dédicace
À tous ceux qui ont osé franchir les frontières, physiques et émotionnelles, et à tous ceux qui ont trouvé l’amour dans des endroits inattendus.
Emplissez vos cœurs de courage pour suivre vos rêves, même lorsque le chemin est incertain.
Abbaye – chambre minuscule – Journal d’Aurélie – 7h00
Cinq heures. Les cloches sonnent. Le premier appel à la prière de la journée. Déjà trois jours que je suis ici. Je n’arrive plus à me rendormir. Elles sonnent et résonnent comme un écho. Vont-elles se taire ? Je me couvre la tête à l’aide de l’oreiller, histoire d’étouffer les sons. En vain. – Lève-toi ! me souffle ma conscience. Profite de l’aube, de la douceur de l’air, des couleurs extraordinaires que t’offre le ciel, du chant des oiseaux. Mets ton nez dehors ! J’enfile rapidement un jean, un tee-shirt et un gilet. Les jardins de l’abbaye s’étendent sur plusieurs centaines de mètres. La rosée sur les plantes médicinales m’offre un chapelet de fragrances différentes. J’erre entre les allées pendant une bonne demi-heure. Une paix m’envahit. Mes pas me guident vers la chapelle. J’entre sans bruit. Ils sont là debout, côte à côte, un missel à la main. Je ferme les yeux et j’écoute religieusement le Salve Régina. Toutes mes sombres pensées, mes noirs désespoirs s’envolent. Je le distingue. Il m’aperçoit, m’adresse un signe de tête accompagné d’un léger sourire. Les chants continuent d’adoucir les tumultes de mon esprit et quelques larmes s’échouent le long de mes joues. Je suis assise au fond de la chapelle, les yeux fermés.
Une main sur mon épaule me fait sursauter.
– Aurélie ! L’office est terminé depuis 10 mn.
– Pardon ? Oh je suis désolée ! Je ne m’en étais pas rendu compte. C’était tellement beau ! Comme une éternité vide de turbulence.
Je sens dans son regard comme de l’étonnement, presque de la surprise. Peut-être ai-je rêvé ?
Tout en me décochant un sourire énigmatique, il m’entraîne vers la cour.
– J’ai parlé à l’abbé Albert de votre désir de participer aux besognes de notre communauté. Vous travaillerez avec moi à l’herboristerie.
Mon cœur dans ma poitrine s’affole. Je ne m’y attendais pas un seul instant. Lorsque je lui ai fait part que l’oisiveté me pesait, je pensais que mes futures attributions se feraient dans les cuisines ou au secrétariat ou encore dans la tenue de leur blog. Nous serons donc ensemble une bonne partie de la journée.
– Quand commençons-nous ?
Il me semble que ma voix tremble. Je croise ses yeux d’un bleu intense. Il ne porte pas ses lunettes ce matin.
Le sol va-t-il s’ouvrir, là maintenant, sous mes pieds ?
– Excusez-moi, je vais aller me changer.
La petite voix de ma conscience, qui tantôt me soufflait de prendre l’air, de sortir m’aérer, de profiter de l’aube me répète : ‘’Fuis ! Rentre chez toi !’’
