Arthur et Merlin, les origines

Gandalf est à la barre.
Je sens son regard percer les sombres nuages.
J’imagine son visage, sourcils froncés, quelques rides d’anxiété venant creuser un peu plus ses traits.
Lui aussi l’a pressenti. Nous avons essuyé maintes tempêtes.
Mais nous savons tous deux que celle-ci sera la plus violente.
Les elfes préparent les amarres d’or de l’Elfira.
Mais le gréement se libérera cette nuit .

Déjà l’averse.
Je n’ai rien pu faire !
Toute ma magie n’a servi à rien.
Je ne suis qu’un vieux fou présomptueux.

Frodon le savait.
Il est resté sur le pont, sans trembler, tandis qu’autour les éléments se déchainaient.
Était-ce du courage ? De la résignation ?
Lorsque je suis arrivé près de lui pour le retenir, il était déjà trop tard.
Sa tête venait de heurter la proue.
Pourquoi a-t-il quitté la Comté.
Repose en paix Frodon ! Que les flots t’emmènent vers les rives de la sérénité.
Tu as sauvé la vie, l’espoir et l’amour.
Ton nom, jamais, ne sera oublié.
Il fut le seul que nous perdîmes cette nuit là.
Le bateau s’est échoué sur une plage de sable blanc.
Pareil à de la neige.
Où sommes-nous ?
L’avenir m’est encore incertain. Et cependant, j’ai la certitude que notre voyage s’achève et atteint son but.

Aknor criait presque.
    – Etes-vous certain que ce soit bien eux ?
    – La prophétie s’accomplit. Il faut l’accepter.
Astrophate s’était levé, prenant appui sur le sceptre d’argent.
Sa voix n’était que murmure comme l’écho lointain de nos pensées.
Le vieux prêtre détenait le secret de notre avenir.
Lorsque la lune était ronde et brune, nous avions coutume de nous réunir au “champs des étoiles”.
Nous l’appelions ainsi car de là nous pouvions contempler toutes les constellations.
L’homme sans cheveux, coiffé d’un heaume serti de rubis, nous dévoilait alors les cantiques du Dieu Arabos.
Oui, tous, nous connaissions la prophétie.
    – Ce cycle n’a pas été bon pour la chasse. Les animaux ne se sont pas reproduits comme durant les autres cycles. Sommes-nous aptes à les accueillir et leur offrir le couvert ?
    – Aknor, coupa Atlas, nous te remercions de la remarque. Nous te sommes reconnaissants de soulever ce problème, mais aussi de l’inquiétude dont tu fais preuve pour notre peuple. Cependant, as-tu oublié les cycles précédents? Nous regorgeons de victuailles gelées.
Il promena son regard sur le peuple Atlante.
Atlas poursuivit.
    – Et toi ma fille, qu’en penses-tu ?
Je me tournais vers ma mère. 

Elle me souriait. Et dans ses prunelles bleues, chantait la fierté.
    – Le roi, Atlas, ton père te fait confiance, mon enfant. Astrophate le prêtre, Acador le sorcier ont bercé ton enfance de leur savoir et de leur sagesse. Un jour tu seras notre reine, Ephrasia. Tu devras prendre des décisions. Celle-ci, en ce jour, est importante. Il est temps…
La voix d’Emeylia se tût en moi.
    – Ephrasia n’est qu’une enfant. Est-il sage de la faire participer à ce débat ?
    – Aknor !
Alcador, d’un ton calme et autoritaire brisa la colère du jeune chasseur.
    – Aknor, murmura-t-il, Ephrésia sera notre reine. Sa sagesse est plus puissante que la mienne. Son instinct est infaillible. Elle a relevé bien plus d’épreuves qu’aucun roi avant elle. Elle mérite notre respect, notre attention et notre confiance. Désormais, elle sera notre litengieuse.
Le soleil brillait plus fort.
La rosée s’évaporait à peine.
Un arc-en-ciel persistait près de la fontaine.
Devant moi tous s’agenouillèrent.
Mon père infiltrait mon esprit.
    – Tu vois mon enfant, n’aies aucune crainte. Tu seras à la hauteur de ton devoir.
    – Mais père… Il n’y a pas eu de litengieux depuis bientôt cinq cent ans !
    – Les temps sont venus, mon enfant, où ta sagesse sera le guide de notre peuple.

     – Gandalf, où sommes-nous ? me demanda Légolas inquiet.
     – … J’ai parfois entendu parler de terres lointaines où vivaient d’autres hommes.

La mer était calme, les rouleaux s’échouaient nonchalamment sur le sable.
Des oiseaux planaient dans le ciel azur. J’observais le vol effréné d’un papillon.
Nous resterons cette nuit encore sur la plage et demain nous entrerons dans la forêt. Pour les rencontrer.
     – Gandalf ! Que nous caches-tu ?
L’elfe s’assit à mes côtés, sur le rocher. Légolas avait le don de clairvoyance. Je ne pouvais lui dissimuler la vérité.
     – Le soleil est déjà bien haut, me dit-il.
     – J’ai vu un arc-en-ciel tout à l’heure, et les oiseaux se sont tus. Il s’est passé quelque chose. Gandalf, qu’est-ce que c’est ?
     – Une révélation, Légolas, ce n’était rien qu’une révélation.
Je me mis à penser à Bilbon le hobbit. Il était alité depuis plus d’une semaine, ses faibles forces le quittaient au fil des heures. Je le préparais doucement à ce prochain voyage. Nous parlions du temps d’avant, le temps avant l’Anneau.
Parfois, lorsque le souffle lui revenait, il me confiait quelques unes de ses aventures. Légolas était venu me voir un soir. J’étais à la proue, admirant le coucher du soleil. Des dauphins nous saluaient de temps à autre d’un rire chaleureux.
     – Il va s’éteindre ce soir, n’est-ce pas ? Ne laissez pas Frondon le veiller cette nuit.
Mon regard ne cilla pas, pourtant quelque chose d’humide vint mourir sur mes lèvres.
L’elfe posa une main sur mon épaule, réconfortante.
     – Mes pensées, Gandalf, se dessinent dans les étoiles.

Je revins au moment présent.
     – Demain tu comprendras, dis-je me tournant vers Légolas. Demain, nous construirons l’avenir d’un peuple que nul sur cette terre ne connait.

Les voiles étaient restées intactes. Certains entreprirent de confectionner des tentes. D’autres partirent en quête de nourriture.

Comme ils étaient gracieux ! Des êtres aux gestes fluides, presque aériens. On devinait le respect qu’ils portaient indéniablement à la nature.

Leur longue chevelure flottait dans l’air léger, il était difficile de discerner s’ils étaient hommes ou femmes.

Mais tous étaient attristés.

Un petit corps allongé sur un radeau tout juste apprêté, était étendu, les mains enlacées.

L’homme aux cheveux blancs, certainement leur sorcier, avait prononcé quelques incantations incompréhensibles.

Sa douleur fut perçue par toute l’île.

Alors, nous sûmes au silence des oiseaux, qu’enfin la prophétie s’accomplirait bientôt.

Chacun de nous, muets, regardâmes vers le temple.

“Quand le premier enfant des deux peuples aura dix ans, nous quitterons notre île.
De nos deux peuples naîtra la plus grande légende, le plus grand roi.
Notre île disparaîtra dans les flots, pour revivre sous un autre nom.
Notre peuple survivra, sauvé par des étrangers venus de la mer.”

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