Valto Dio, l'illusionniste

La lumière tamisée du wagon dessinait d’étranges reflets sur les visages des passagers. Il les observa quelques instants.
Derrière lui, une femme d’une soixantaine d’années, à l’allure chétive, les cheveux en désordre, comme de vieilles toiles d’araignées tombantes, tenait fermement une valise entre ses bras.
Elle balayait sans cesse les alentours du regard. Que dissimulait-elle de si précieux, que craignait-elle ?
Deux rangs devant, un couple s’efforçait d’occuper trois enfants agités.
Peut-être n’avaient-ils que cinq ou sept ans.
À l’extrémité du wagon, deux hommes, élégamment vêtus de costumes noirs, disputaient une partie d’échec.
Il s’intéressa, ensuite, à son voisin.
La barbe grisonnante, cheveux rares et ondulés, il frottait régulièrement la manche de sa veste grise, comme pour enlever des poussières imaginaires.
De temps à autre, il se plongeait dans la lecture d’un magazine.
Le train roulait à présent à vive allure. Le tapage des enfants altérait le doux ronronnement de l’express.
Il essaya de replonger dans une attitude contemplative de la campagne.
Il venait juste de fermer les yeux, quand un cri aigu le sortit de sa torpeur.
La femme, aux cheveux de toiles d’araignées, hurlait. Les deux joueurs d’échec venaient de lui dérober la valise.
Les enfants s’étaient réfugiés dans les bras du couple.
Son voisin se rua alors sur l’un des voleurs. Il le poussa si violemment qu’ils roulèrent tous deux au sol.
Valto courut après l’autre comparse à travers les wagons, bousculant sur son passage quelques voyageurs, tantôt en colère, tantôt surpris.
L’homme au complet noir stoppa sa course. Stupéfait de voir son poursuivant se tenir devant lui, souriant.
Valto sortit une baguette rouge de l’intérieur de sa parka, tapota trois fois sa manche, et une colombe s’envola dans le compartiment.
Profitant de l’étonnement général, il disparut, tenant avec fermeté la valise.
