Une poule à Supermiam

Le soir lorsque je rentre de mon travail, je passe devant le magasin Supermiam.

Malgré le nombre de promos annoncées sur des prospectus au graphisme désuet, je n’y suis jamais allé. Mais dans trois jours, elle venait pour la première fois dîner. Enfin ! Elle avait accepté l’invitation ! Au bout de deux mois, je n’avais rien lâché ! Je me disais bien qu’elle allait, un jour, finir par craquer !

J’avais l’intention de lui concocter ma recette favorite : Des pommes de terre farcies à la chair d’escargot. J’en salivais déjà ! Il me manquait de l’ail. Un saut à Supermiam vite fait, ne devrait pas entraver mon emploi du temps, pensais-je.

Le magasin fermait bientôt. Les rayons se désertaient rapidement.

Je fis le tour en vain. Aucun ail à l’horizon, ni dans les moindres recoins. Qu’allait-il advenir de ma super recette ? Tandis que je tentais mentalement de résoudre cet épineux problème, je jetais un œil dans la réserve au fond du supermarché. Ce que je vis me fit stopper net ! Mon cerveau arrêta de fonctionner. Oublié mon super repas ! Une énorme poule picorait à l’aide d’une serpillière le sol de la réserve. La poule se mit sur deux jambes, entonna le refrain de Maldon. Mais si vous connaissez ! Balayer, astiquer, lalala… Elle se frottait contre les rayonnages, en se dandinant. Les plumes passaient et repassaient sur les étagères faisant voltiger une foultitude de poussière. La bête attrapa un seau, se mit au dessus. Effaré, je vis l’œuf sortir de son plumage et venir s’éclater sur le sol. Un mélange visqueux à l’odeur de javel s’évada de la coquille. La poule fit entendre un cotcotcot retentissant.

Je regardais autour de moi. J’étais seul avec la gallinacée.

Je vous avoue que je fus pris d’une étrange panique et sortit rapidement.

Le lendemain, je ressassais mentalement cette aventure étrange. Histoire de ne pas être prit pour un fou, je m’abstins de le raconter à quiconque.

Mais ma curiosité était piquée. Le soir, je fis à nouveau une escale à Supermiam. La même scène se reproduisit. Puis le surlendemain.

Ce soir là, était le Grand Soir.

J’étais un peu en retard, j’avais enfin trouvé mon ail !
La sonnette de la porte d’entrée retentit. Un tantinet nerveux, j’ouvris la porte.
Elle était là, un sourire aux lèvres.
– Bonsoir, me dit-elle, j’espère ne pas être trop en retard ! Je n’avais pas fini mon travail. Tu sais ce que c’est, me lança-t-elle, on sait quand on commence à nettoyer mais pas quand on finit.
Je rejetais l’image de la poule de Supermiam.
– Veux-tu que je te débarrasse de ta veste ?
Elle me la tendit.
Alors que je l’accrochais à la patère, une plume rousse s’échappa de la manche.